La médiation familiale
Apparue aux Etats- Unis dans les années 1960 et largement présente en Europe du Nord dès les années 1990 , la médiation familiale reste encore marginale en France , où elle a fait une timide apparition il y a une quinzaine d’années .
Ce sont des professionnels confrontés aux conséquences dramatiques de certaines situations de séparation conflictuelles , en particulier sur les enfants , qui ont été les précurseurs de cette pratique .
Les juristes s’y sont également intéressé .
Actuellement il existe quelques centaines de services de médiation en France pour 140 000 divorces, et 300 000 à 400 000 séparations par an.
Une pratique appelée à de développer :
Dans notre pays , la médiation familiale est régie par la loi du 08 Février 1995 et un décret du 22 Juillet 1996 .
Pourquoi la médiation a t-elle connu jusqu’à présent aussi peu de succès et accusé un tel retard par rapport à d’autres pays d’Europe ?
Selon un rapport de Mars 2001 commandé par Ségolène Royal , ministre déléguée à la famille et à l’enfance , " la médiation familiale s’inscrit difficilement dans notre culture du conflit ".
La majorité des couples a recours d’emblée à une procédure judiciaire , gardant l’illusion que le juge aux affaires familiales trouvera , à coup sûr , la solution parfaite pour mettre un terme à leurs différends.
La loi de 1975 sur le divorce par consentement mutuel n’a pas diminué les contentieux liés au divorce .
Les concubins qui se séparent font de plus en plus souvent appel à la justice .
La réforme du droit de la famille engagée par le gouvernement en 2004, en posant le principe du maintien de la coparentalité en cas de rupture du couple , et en promouvant la mise en place de la résidence alternée des enfants , contraint les parents à la concertation .
La suppression du divorce pour faute plaide elle aussi en faveur d’une montée en puissance de la médiation familiale.
Lors des débats parlementaires relatifs à la proposition de loi sur l’autorité parentale ( adoptée en première lecture le 14 juin 2001 ), le principe du développement de la médiation familiale a fait l’unanimité.
Les aides publiques aux structures de médiation seront encouragées .
Un conseil national consultatif de la médiation familiale a été créé par arrêté du 08 Octobre 2001.
Celui-ci a pour objectif d’accompagner et de structurer la médiation familiale :
Information du public et des professionnels par la création d’un livret d’information , un site internet , sensibilisation des services publics etc...
Enfin un diplôme national de formation continue sera créé : Le certificat d’aptitude à la fonction de médiateur familial .
A présent , la personne chargée de l’exécution de la mesure de médiation doit satisfaire à certaines conditions prévues par les textes :
"Ne pas avoir fait l’objet d’une condamnation , d’une incapacité ou d’une déchéance".
"N’avoir pas été l’auteur de faits contraires à la probité et aux bonnes moeurs , ayant donné lieu à une sanction disciplinaire ou administrative ".
"Posséder , par l’exercice présent ou passé d’une activité ", la qualification correspondant à la nature du litige.
"Justifier , selon le cas , d’une formation ou d’une expérience adaptée à la pratique de la médiation "
"Présenter les garanties d’indépendance nécessaires à l’exercice de la médiation ".
La médiation familiale : Pourquoi ? Quand ? Comment ? :
La médiation familiale tente de gérer les conflits liés aux changements dans une famille dont les parents se séparent .
En effet , la résolution du conflit ( ou des désaccords ou du désamour ) des membres d’un couple par la séparation , ne signifie pas une interruption de leur relation , en particulier lorsqu’ils ont des enfants .
Lors de la séparation , certains enjeux relationnels peuvent être réactivés , d’autres apparaître , rendant difficiles des prises de décision communes.
En particulier , la fonction parentale , souvent le seul lien qui reste entre les parents , peut devenir le siège des tensions et des conflits , dont les enfants sont les premières victimes .
La présence d’un tiers peut aider les parents à restaurer une relation acceptable pour un exercice consensuel de leur autorité parentale.
La médiation familiale peut prendre diverses formes et intervenir à des moments différents de la séparation .
Il peut s’agir "d’une aide à la décision" , soit à la demande du couple lui-même , soucieux de négocier un accord avant d’entamer une procédure judiciaire , soit sur proposition du juge aux affaires familiales , lorsque celui-ci est saisi mais que la procédure bloque ( désaccord sur la procédure ou sur la solution du divorce )
Sous forme de trois ou quatre entretiens avec le couple , ce travail a pour objectif de permettre à chacun des membres du couple de se situer , de se responsabiliser par rapport à un choix : Divorcer ; selon quelle procédure ou ne pas divorcer.
Les demandes de médiation familiale avant la procédure judiciaire tendent à se développer.
Aujourd’hui, les couples sont de plus en plus nombreux à partager l’idée que, faute d’avoir réussi leur mariage ou leur union, il est important de tout mettre en oeuvre pour que la séparation se passe le mieux possible.
Et plus elle intervient en amont du conflit , plus une médiation est efficace.
Lorsque la médiation débute en dehors de toute intervention judiciaire , les parties sont davantage responsabilisées et coopèrent plus facilement à la négociation .
La médiation familiale extra-judiciaire permet alors d’éviter le recours à la justice , ou de préparer le règlement judiciaire .
Mais au cours de la procédure du divorce ou même après le divorce , le juge aux affaires familiales , confronté à un conflit à propos de la résidence des enfants , du droit de visite , du patrimoine etc ..., peut souhaiter favoriser la recherche d’un règlement amiable et ordonner une médiation familiale .
Celle-ci est limitée dans le temps ( trois mois renouvelables une fois à la demande du médiateur ).
Des entretiens avec le couple parental, et les enfants si nécessaire, ont pour objectifs :
- De poser avec eux le(les) problème (s) en terme relationnel.
- De tenter de clarifier les enjeux.
- De redéfinir le conflit.
- De favoriser un nouveau jeu relationnel où tous les protagonistes sont gagnants .
Cette médiation doit permettre au couple divorçant ou divorcé d’élaborer un accord écrit avec l’aide du médiateur, et parfois les avocats pour la formalisation .
Cet accord est soumis à l’homologation du juge aux affaires familiales.
Une médiation familiale judiciaire ne dessaisit pas le juge aux affaires familiales.
IL peut prendre à tout moment les mesures qui lui paraissent nécessaires.
La médiation est une pause , qui peut intervenir à tout moment de la procédure , y compris en référé.
Les textes précisent le déroulement de la médiation familiale judiciaire et le cadre d’intervention du médiateur :
Le document d’ordonnance de médiation doit mentionner l’accord des parties , désigner le médiateur et la durée initiale de sa mission. Il indique la date à laquelle l’affaire est rappelée à une audience ultérieure. Il fixe le montant d’une provision (à verser par chacune des parties en consignation ) , correspondant à une évaluation aussi proche que possible de la rémunération prévisible du médiateur.
A noter que l’aide juridictionnelle peut couvrir les frais de médiation.
Le versement de la provision , acte concret d’engagement des deux membres du couple parental dans la démarche de médiation familiale, déclenche la convocation des parties par le médiateur .
le médiateur ne dispose pas de pouvoirs d’instruction mais peut , avec l’accord des personnes et pour les besoins de la médiation , entendre des tiers ( les enfants par exemple ).
Le médiateur est tenu à l’obligation de secret lié à sa mission .
Ses constatations et les déclarations qu’il recueille ne peuvent être évoqués devant le juge qu’avec l’accord des parties .
Elles ne peuvent être utilisées dans une autre instance .
Toutefois , le médiateur informe le juge de ce que le couple est ou non parvenu à un accord et des difficultés rencontrées dans l’accomplissement de sa mission .
Notre expérience en matière de médiation familiale nous a montré combien cet outil peut être riche et créatif .
Il permet aux couples séparés ou divorcés ( ou en instance de l’être ) de garder ou de reprendre la responsabilité des décisions qui les concernent .
Lorsqu’il y a accord , chaque participant sort grandi et nous exprime sa satisfaction d’avoir été capable de dépasser le conflit et de parvenir à imaginer des solutions uniques , tenant compte des réalités , des attentes et des possibilités de chacun .
Anne Bouve
Pour l’ I.R.E.F.
http://www.institut-famille.com/
Association composée de thérapeutes formés à la thérapie familiale, conjugale et systémique.
Chaque membre de l' I.R.E.F. exerce par ailleurs une activité professionnelle dans le domaine social ou de la santé, et intervient bénévolement dans l’association.